Ainsi, Barbora Hrubá, de l’agence touristique de Prague, expliquait au journal anglais « The Guardian », à l’unisson avec Xavier Marcé, un responsable touristique de Barcelone et Paola Mar de Venise : « nous ne voulons pas plus de touristes, nous voulons plus de visiteurs » ! - Depositphotos.com - kanuman
Drôle de période, le monde change sous nos yeux, en bien ou en mal selon les jours et le niveau d’informations recueillies sur ce fichu virus qui, malgré un combat acharné, continue de nous narguer.
Dans cet univers souffreteux promis à un avenir pour le moins incertain, d’aucuns bouclent tout de même leurs valises et changent d’air, d’autres comme d’habitude restent chez eux (et ils sont nombreux : près de 40%) tandis qu’une partie hésite encore : vers quels cieux se tourner ? Hors frontières peut-être ? Mais, où ? Les mesures de reconfinement partiel dans un pays comme l’Espagne incitent à la prudence voire à la défiance.
Pourtant, la dernière marotte de nos confrères journalistes consistant à décrire la pandémie (comme je l’ai fait le 27 février 2020 lire) comme le meilleur moyen de lutter contre le « surtourisme » devrait rassurer.
Oui, en ces temps difficiles : Venise, Rome, Paris, Amsterdam, Barcelone… deviennent apparemment fréquentables et mériteraient (selon eux) un petit séjour dont on vous promet qu’il sera détendu, tranquille, presqu’intime.
Enfin, un « entre soi », dans des rues vidées de leurs « touristes », avec seulement des gens comme vous et moi, c’est à dire des gens bien élevés qui ne s’agglutinent pas, ne jettent pas de papiers par terre, visitent des musées en silence, s’habillent décemment et qui ne méritent donc pas le qualificatif ombrageux et résolument péjoratif de « touristes » !
… Si cette image idéalisée est en partie vraie, elle n’occulte cependant pas les tout nouveaux clichés que produit le tourisme urbain en cet été 2020, dont certains ont pour auteur la réalité pandémique, alors que d’autres proviennent plus sagement des politiques déjà engagées par les villes d’avant Covid.
De quels clichés s’agit-il ?
Dans cet univers souffreteux promis à un avenir pour le moins incertain, d’aucuns bouclent tout de même leurs valises et changent d’air, d’autres comme d’habitude restent chez eux (et ils sont nombreux : près de 40%) tandis qu’une partie hésite encore : vers quels cieux se tourner ? Hors frontières peut-être ? Mais, où ? Les mesures de reconfinement partiel dans un pays comme l’Espagne incitent à la prudence voire à la défiance.
Pourtant, la dernière marotte de nos confrères journalistes consistant à décrire la pandémie (comme je l’ai fait le 27 février 2020 lire) comme le meilleur moyen de lutter contre le « surtourisme » devrait rassurer.
Oui, en ces temps difficiles : Venise, Rome, Paris, Amsterdam, Barcelone… deviennent apparemment fréquentables et mériteraient (selon eux) un petit séjour dont on vous promet qu’il sera détendu, tranquille, presqu’intime.
Enfin, un « entre soi », dans des rues vidées de leurs « touristes », avec seulement des gens comme vous et moi, c’est à dire des gens bien élevés qui ne s’agglutinent pas, ne jettent pas de papiers par terre, visitent des musées en silence, s’habillent décemment et qui ne méritent donc pas le qualificatif ombrageux et résolument péjoratif de « touristes » !
… Si cette image idéalisée est en partie vraie, elle n’occulte cependant pas les tout nouveaux clichés que produit le tourisme urbain en cet été 2020, dont certains ont pour auteur la réalité pandémique, alors que d’autres proviennent plus sagement des politiques déjà engagées par les villes d’avant Covid.
De quels clichés s’agit-il ?
Le tourisme urbain masqué des carnavals manqués
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Outre les masques plus ou moins bien accrochés à des visages dont on devine de moins en moins bien l’origine et l’expression, les valises à roulettes qui tintinnabulaient sur les trottoirs de certains quartiers font désormais figure de vestiges d’un passé révolu.
Les touristes sont rarissimes pour toutes les raisons que l’on connaît, et les abords des grands et moins grands hôtels autrefois bruissants de va et vient sont désormais silencieux.
Parfois définitivement (on craint 30% de faillites). Les abords des musées sont aussi rendus au calme de certains jours de grève générale.
Et les chauffeurs de taxis n’ont jamais été aussi désœuvrés. En revanche, les places, trottoirs, chaussées se sont mutés en vastes terrasses de restaurants et bistrots dont certaines surélevées sur des estrades plus ou moins fleuries et décorées contribuent heureusement à détendre l’atmosphère.
Autre constat : la multiplication indéniable de pistes cyclables, la multiplication des cyclistes et, hélas, celle des trottinettes en libre service qui rendent la vie impossible aux piétons et aux automobilistes obligés de surveiller de près les auteurs d’une nouvelle forme de délinquance urbaine consistant à ne pas respecter le code de la route dés lors que l’on roule sur deux roues !
Les touristes sont rarissimes pour toutes les raisons que l’on connaît, et les abords des grands et moins grands hôtels autrefois bruissants de va et vient sont désormais silencieux.
Parfois définitivement (on craint 30% de faillites). Les abords des musées sont aussi rendus au calme de certains jours de grève générale.
Et les chauffeurs de taxis n’ont jamais été aussi désœuvrés. En revanche, les places, trottoirs, chaussées se sont mutés en vastes terrasses de restaurants et bistrots dont certaines surélevées sur des estrades plus ou moins fleuries et décorées contribuent heureusement à détendre l’atmosphère.
Autre constat : la multiplication indéniable de pistes cyclables, la multiplication des cyclistes et, hélas, celle des trottinettes en libre service qui rendent la vie impossible aux piétons et aux automobilistes obligés de surveiller de près les auteurs d’une nouvelle forme de délinquance urbaine consistant à ne pas respecter le code de la route dés lors que l’on roule sur deux roues !
Un tourisme nocturne dévasté
Pire ! « Sans musique, la vie n’est qu’un enfer, un chaos », disait F.Nietzsche. On pourrait parodier le philosophe en écrivant que « sans musique, la ville n’est qu’un enfer » ! Finis les grands concerts (y compris dans les parcs et jardins), les discothèques, les bars de nuit technophiles répandant leurs clients et leurs sonos hors les murs.
Plus calme, la nuit rendue à ses dormeurs est surtout plus triste. Et, les jeunes fêtards font grise mine. Seuls les urbains aux oreilles sensibles semblent heureux de cette métamorphose inattendue.
Autres fermetures désespérantes de tristesse : celles de commerces dans des quartiers dédiés au shopping : une boutique sur 2 a fermé boulevard Saint Michel à Paris, y compris de grandes enseignes.
Certes, quelques brocantes réinvestissent le pavé, mais est-ce une bonne idée ? Les clients ont plutôt tendance à les bouder. Seules les Galeries Lafayette font contre mauvaise fortune bon cœur en déclarant avoir retrouvé 50% de leur clientèle parmi laquelle une bonne part de Parisiens qui redécouvrent ce magasin iconique.
Plus calme, la nuit rendue à ses dormeurs est surtout plus triste. Et, les jeunes fêtards font grise mine. Seuls les urbains aux oreilles sensibles semblent heureux de cette métamorphose inattendue.
Autres fermetures désespérantes de tristesse : celles de commerces dans des quartiers dédiés au shopping : une boutique sur 2 a fermé boulevard Saint Michel à Paris, y compris de grandes enseignes.
Certes, quelques brocantes réinvestissent le pavé, mais est-ce une bonne idée ? Les clients ont plutôt tendance à les bouder. Seules les Galeries Lafayette font contre mauvaise fortune bon cœur en déclarant avoir retrouvé 50% de leur clientèle parmi laquelle une bonne part de Parisiens qui redécouvrent ce magasin iconique.
Un nouveau modèle économique
… En perte d’attractivité à cause de l’épidémie, la ville touristique a cependant compris qu’elle pouvait tirer un parti inespéré de cette crise en repensant son tourisme. Une évidence que de nombreux professionnels approuvent, en particulier sur le plan quantitatif.
Ainsi, Barbora Hrubá, de l’agence touristique de Prague, expliquait au journal anglais « The Guardian », à l’unisson avec Xavier Marcé, un responsable touristique de Barcelone et Paola Mar de Venise : « nous ne voulons pas plus de touristes, nous voulons plus de visiteurs » !
Le changement de terminologie est éloquent. Le touriste n’a plus les faveurs des élus. Mais, quand on sait que Barcelone comptait 30 millions de touristes en 2019, Venise : 25 et Amsterdam : 19 millions… on mesure mieux les difficultés économiques que ce genre de calcul peut entraîner.
D’autant que les recettes à mettre en œuvre pour limiter les flux ont déjà été expérimentées et n’ont pas produit les miracles escomptés.
Ainsi, dans le domaine de l’hébergement, on pourrait noter comme effet bénéfique : le recul affirmé des locations sur Airbnb. A Venise, on signale même que les propriétaires peuvent signer un accord avec la ville pour loger des étudiants.
Amsterdam, Barcelone et Lisbonne ont aussi pris des mesures emblématiques de ce nouvel état d’esprit en limitant les locations, en les chassant des centres-villes, en les rachetant… avec pour premier résultat une augmentation de l’offre de location traditionnelle. Pour combien de temps ? Là est la question.
Sur le front des croisières et de leurs mastodontes, on réfléchit aussi à un avenir meilleur. Marseille, on l’a dit, électrifie ses quais et Dubrovnik limitait déjà le nombre d’escales.
Détourner les flux vers des sites moins encombrés est aussi une solution envisagée par certains. Ainsi, Venise a mis en place le « smart control room », un système de surveillance des flux sensé les rediriger vers des lieux moins encombrés et évoquent toujours des portiques payants pour entrer sur la place Saint Marc.
Mais, dans ce domaine, la partie est d’autant plus mal engagée que des villes comme Barcelone et Venise reçoivent beaucoup de « day trippers ». On songe aussi à étaler les flux dans le temps. Une antienne connue sous le terme d’étalement de la saison !
Enfin, les autorités de Barcelone (où le low cost représente 4 millions d’arrivées) se résolvent à penser que le marché du low-cost va devoir changer. Et cela pour deux raisons : d’une part, parce que le secteur aérien est en crise et d’autre part parce que le rapport à la mobilité est en train d’être repensée…
Une attitude pour le moins angélique. Il ne me semble pas pour ma part que l’aérien s’amendera de lui-même une fois la crise passée. Si les voyageurs boudent le low-cost, ce sera plus par souci de confort que par idéalisme.
Ainsi, Barbora Hrubá, de l’agence touristique de Prague, expliquait au journal anglais « The Guardian », à l’unisson avec Xavier Marcé, un responsable touristique de Barcelone et Paola Mar de Venise : « nous ne voulons pas plus de touristes, nous voulons plus de visiteurs » !
Le changement de terminologie est éloquent. Le touriste n’a plus les faveurs des élus. Mais, quand on sait que Barcelone comptait 30 millions de touristes en 2019, Venise : 25 et Amsterdam : 19 millions… on mesure mieux les difficultés économiques que ce genre de calcul peut entraîner.
D’autant que les recettes à mettre en œuvre pour limiter les flux ont déjà été expérimentées et n’ont pas produit les miracles escomptés.
Ainsi, dans le domaine de l’hébergement, on pourrait noter comme effet bénéfique : le recul affirmé des locations sur Airbnb. A Venise, on signale même que les propriétaires peuvent signer un accord avec la ville pour loger des étudiants.
Amsterdam, Barcelone et Lisbonne ont aussi pris des mesures emblématiques de ce nouvel état d’esprit en limitant les locations, en les chassant des centres-villes, en les rachetant… avec pour premier résultat une augmentation de l’offre de location traditionnelle. Pour combien de temps ? Là est la question.
Sur le front des croisières et de leurs mastodontes, on réfléchit aussi à un avenir meilleur. Marseille, on l’a dit, électrifie ses quais et Dubrovnik limitait déjà le nombre d’escales.
Détourner les flux vers des sites moins encombrés est aussi une solution envisagée par certains. Ainsi, Venise a mis en place le « smart control room », un système de surveillance des flux sensé les rediriger vers des lieux moins encombrés et évoquent toujours des portiques payants pour entrer sur la place Saint Marc.
Mais, dans ce domaine, la partie est d’autant plus mal engagée que des villes comme Barcelone et Venise reçoivent beaucoup de « day trippers ». On songe aussi à étaler les flux dans le temps. Une antienne connue sous le terme d’étalement de la saison !
Enfin, les autorités de Barcelone (où le low cost représente 4 millions d’arrivées) se résolvent à penser que le marché du low-cost va devoir changer. Et cela pour deux raisons : d’une part, parce que le secteur aérien est en crise et d’autre part parce que le rapport à la mobilité est en train d’être repensée…
Une attitude pour le moins angélique. Il ne me semble pas pour ma part que l’aérien s’amendera de lui-même une fois la crise passée. Si les voyageurs boudent le low-cost, ce sera plus par souci de confort que par idéalisme.
Un marketing plus objectif pour des villes bienveillantes et durables
Sur le plan de la promotion, certaines villes ont également avoué avoir coupé leurs budgets et cessé de se promouvoir.
C’est le cas d’Amsterdam. Jusqu’à quand ? Mais, l’on pourrait peut-être surtout envisager de mettre en application l’une des recommandations de la Convention citoyenne obligeant les annonceurs à mentionner sur leurs publicités les dégâts que font leurs produits sur l’environnement !
A l’inverse, on pourrait cependant mentionner que les politiques de la ville depuis plus d’une décennie, n’ont pas attendu cette crise pour combattre leurs maux environnementaux.
Dans le domaine du durable, reconnaissons que la plupart des villes tendent à se reverdir, à ralentir, à reconquérir de l’espace pour leurs habitants, à partager leurs jardins et espaces de travail et de loisirs, à se rafraîchir, à être plus propre, plus abordable, plus intelligente (en matière de parkings, mobilités douces).
N’oublions pas non plus la sécurité et la nécessité pour les villes de superposer des mesures sanitaires à des mesures sécuritaires indispensables pour lutter contre la menace terroriste qui n’a hélas pas disparu.
C’est le cas d’Amsterdam. Jusqu’à quand ? Mais, l’on pourrait peut-être surtout envisager de mettre en application l’une des recommandations de la Convention citoyenne obligeant les annonceurs à mentionner sur leurs publicités les dégâts que font leurs produits sur l’environnement !
A l’inverse, on pourrait cependant mentionner que les politiques de la ville depuis plus d’une décennie, n’ont pas attendu cette crise pour combattre leurs maux environnementaux.
Dans le domaine du durable, reconnaissons que la plupart des villes tendent à se reverdir, à ralentir, à reconquérir de l’espace pour leurs habitants, à partager leurs jardins et espaces de travail et de loisirs, à se rafraîchir, à être plus propre, plus abordable, plus intelligente (en matière de parkings, mobilités douces).
N’oublions pas non plus la sécurité et la nécessité pour les villes de superposer des mesures sanitaires à des mesures sécuritaires indispensables pour lutter contre la menace terroriste qui n’a hélas pas disparu.
Sortir de la monoculture touristique en évitant les excès
Josette Sicsic - DR
Ne reste donc plus qu’à sortir l’économie des villes de leur monoculture touristique qui se révèle peu payante pour les réadapter à leur population locale, sans pour autant tomber dans les excès.
En effet, les excès sont possibles. Ainsi, le nouveau maire de Lyon a indiqué dans ses promesses de campagne vouloir promouvoir le tourisme d’affaires de la capitale des Gaules sur les environs et pas à l’international, histoire d’éviter les vols longs-courriers trop polluants !
Les dérapages sont, on le voit, risqués !
Sauf que, plus réaliste, la mairie de Valence en Espagne a, pour sa part, indiqué vouloir devenir la première destination touristique neutre en carbone en réduisant et compensant ses émissions de CO2.
Une excellente initiative qui fera forcément des émules !
En effet, les excès sont possibles. Ainsi, le nouveau maire de Lyon a indiqué dans ses promesses de campagne vouloir promouvoir le tourisme d’affaires de la capitale des Gaules sur les environs et pas à l’international, histoire d’éviter les vols longs-courriers trop polluants !
Les dérapages sont, on le voit, risqués !
Sauf que, plus réaliste, la mairie de Valence en Espagne a, pour sa part, indiqué vouloir devenir la première destination touristique neutre en carbone en réduisant et compensant ses émissions de CO2.
Une excellente initiative qui fera forcément des émules !
DEMAIN, LE TOURISME ! Rejoignez le Groupe Facebook animé par Josette Sicsic et Jean Da Luz
Vous pouvez encore rejoindre le groupe Facebook « Demain le tourisme » et donnez votre avis sur ce que sera le tourisme demain.
Les décryptages et analyses de TOURISCOPIE sur TourMaG.com
Retrouvez les décryptages et les analyses de TOURISCOPIE par Josette SICSIC sur TourMaG.com.
Contact : touriscopie@gmail.com
Pour aller plus loin, réécoutez le débat "Le tourisme a-t-il de beaux jours devant lui ?" sur RFI du 12 juin 2020, auquel Josette Sicsic a participé : www.rfi.fr/fr/podcasts/20200612-le-tourisme-a-t-il-beaux-jours-devant-lui
Contact : touriscopie@gmail.com
Pour aller plus loin, réécoutez le débat "Le tourisme a-t-il de beaux jours devant lui ?" sur RFI du 12 juin 2020, auquel Josette Sicsic a participé : www.rfi.fr/fr/podcasts/20200612-le-tourisme-a-t-il-beaux-jours-devant-lui